15 avril 2010

Les cerfs volants de Kaboul : un livre à lire absolument

Ou up in the air 2, si j'ose dire.

Ne vous méprenez pas, ici on parle de livre. Mais il faut quand même que je vous replace le contexte de lecture, qui a sans doute beaucoup contribué au plaisir pris à dévorer ce bouquin. Ceux que ça ennui peuvent donc aller directement à la fin de ce billet.
 
Pour les autres, je ne vous cache rien en vous apprenant que j’ai eu beaucoup de temps pour lire ces derniers jours.



En effet, l’avantage d’aller se perdre à l’autre bout du monde en radinant sur le coût des transports aériens, c’est qu’on peut du coup se taper 24h aller, 27h retour d’avion, en comptant les escales, avec rien d’autre à faire que de manger, dormir ou embêter son bulot de droite (activités toutes hautement régressives).
 
Ne nous voilons pas la face : la nourriture dans les avions s’apparente plus à de la pâté pour chat auquel on donne le joli nom de « chicken curry » (ça fait plus chic) et à du papier mâché aggloméré qu’on vous sert diplomatiquement comme une « salade italienne ». Quant au dessert, le terme « prédigéré », pour aussi infâme qu’il paraisse être, me semble quand même assez fréquemment le qualificatif, visuel et gustatif, le plus approprié. Je n’ose même pas vous parler des « restaurants » qu’on trouve dans les aéroports, où vous avez le bonheur de transiter pour une durée qui vous semble in(dé)terminable, car servir des hamburgers à base de rognons de chèvres et des frites molles ayant un arrière goût de cambouis bas de gamme , le tout au prix d’un bras, ne me semble pas suffisant pour gagner le qualificatif de « gastronomique ». Appelons un chat un chat, et pour citer mon ami Jean Pierre (qui est malheureusement passé du côté obscure de la force du porte monnaie) « c’est de la merde ! ».
 
Pour la petite anecdote, le bulot et moi-même étant des gens de goût, nous avons profité de notre loooooooooooongue, très longue (trop longue !) escale à l’aéroport de Tataouine les bains pour constater que :
 
1) L’aéroport était environ plus grand que le casque de mon oncle mais moins grand que le jardin de ma grand-mère (ce qui implique qu’en moins de 4 min 30 nous en avions fait un tour assez exhaustif)

2) La nourriture servie était digne de la réputation que je lui faisais (conférer plus haut)

3) Comme tous les aéroports, il était doté d’un lAoundgeu excessivement cher et d’un duty free garni de cigarettes, d’alcools, de Tobleron et de crèmes de nuit

 
C’est donc comme une évidence que nous sommes résolus à adopter la technique de survie suivante :
 
1) Acheter au duty free une bouteille de vin d’Afrique du sud (pas moyen de payer 20 $ un mauvais bordeaux ! On a ses principes !) avec (le détail est primordial) un bouchon en plastique amovible et pas en liège

2) Toujours au duty free, faire provision du plus petit paquet de cacahuètes japonaises (allez comprendre pourquoi, c’était les moins chères) c'est-à-dire du seul paquet qui contienne moins d’un demi kilo de denrées salées presque non périssable

3) Prendre une assiette de frite molle et s’attabler à côté des gens qui mastiquent leurs rognons de chèvre

4) Se torcher la bouteille et les cacahuètes, puis les frites dans la joie te la bonne humeur sous l’œil torve de nos bouffeurs de rognons

5) Comater les longues heures qui nous restent, avachis sur des sièges de hall d’embarquement, dans un demi sommeil éthylico-cacahuètesque

A un moment je me suis quand même demandé, entre deux accès de roupille, si on n’allait pas se réveiller avec des piécettes locales déposées devant nous, rapport qu’on devait ressembler à deux clodos avec nos airs hagards et les fringues plus odeurs de deux personnes ont macérés dans leur jus depuis un bon bout de temps maintenant… et puis en regardant autours de moi, j’ai constaté qu’en fait tout le monde était à peu près dans le même cas, et je me suis rendormie du sommeil du juste.

Cependant, outre cet incident de sommeil profond, il faut bien avouer que n’arrivant déjà pas à passer des nuits complètes de plus de 7h à dormir dans un bon lit confortable, ce n’est pas serrée dans un siège en bois, avec un gros américain puant (et ronflant) à côté de moi, et les hôtesses qui passent toute les deux minutes pour vous fourguer du jus de tomate et de la pâté pour chat, que je vais me mettre à avoir une épiphanie du sommeil et à plonger brusquement dans les bras de morphée.

Voilà pour ce qui concerne donc le manger et dormir, quant à embêter le bulot cela a une limite certaine, rapport qu’en mode automatique le bulot a un taux de conversation en adéquation avec le QI d’un mollusque de son espèce, et se limite donc à pousser des petits grognements signifiant qu’il dort ou qu’il veut dormir et que dans 2s, si j’insiste, il mort.

 
Reste donc l’option de la mise à jour culturelle à base de film hollywoodien en mono (non mais pourquoi je tombe toujours sur LE siège où la connexion du casque est flinguée ? Je vous le demande, hein ?!) et de séries américaines d’il y a 10 ans (si vous n’avez jamais vu FRIENDS et les SIMPSONS, courez acheter un billet d’avion, ça sera l’occasion)… sinon vous pouvez toujours vous rabattre sur les films Tchéchènes sous-titré en chinois qui sont également légion.
 
Le problème est que la capacité lobotomisante du contenu culturel de l’ »entertainement service » a vite fait de vous plonger dans un état proche de la mort neuronale avancée, et j’avoue qu’après avoir regardé « Twilight 2 » et « Thérapie de couple », j’étais proche de la dépression nerveuse aigue.
 
Reste finalement la dernière alternative : emporter avec vous un bon bouquin. Pas le roman de gare, qui est une roue de secours parfaite pour de cours trajets de quelques heures. Non. Là il vous faudra le vrai bon livre, celui qui vous prend au tripes et que vous ne pouvez plus lâcher jusqu’à l’avoir terminé. Celui qui vous transporte ailleurs, si loin que vous levez la tête, dérangé par un élément extérieur fâcheux, un peu surpris de vous trouver tout à coup là et pas à l’autre bout du monde dans une autre époque, avec d’autres gens.

Et je ne remercierais jamais assez mon amie Nadège, qui m’avait chaudement recommandé ce livre, le présentant comme exactement ce qu’il était : un passeport pour l’évasion.



Le livre : les cerfs volants de Kaboul.

 
L’histoire : Dans les années 70 à Kaboul, le petit Amir, fils d’un riche commerçant pachtoun, partage son enfance avec son serviteur Hassan, jeune chiite condamné pour ses origines à exécuter les tâches les plus viles. Inséparables, liés par une même passion pour les cerfs-volants, les garçons grandissent heureux dans une cité ouverte et accueillante. Ni la différence de leur condition ni les railleries des camarades n’entament leur amitié. Mais ce lien va se briser à jamais. Alors que sous ses yeux Hassan subit une véritable ignominie, Amir reste pétrifié. Peur ? Lâcheté ? Honte ? Pris dans une terrible confusion des sentiments, il n’esquissera pas un geste pour sauver son ami.

Eté 2001. Amir est écrivain. Il vit à San Francisco avec sa femme Soraya, sunnite comme lui. Un jour, au bout du fil, un vieil ami de son père lui dit simplement : “Viens. Il existe un moyen de te racheter”. Mais ce rachat passe par une plongée au cœur de l’Afghanistan des talibans… et de son propre passé.



L’histoire peut sembler un peu « banale » car après tout, les thèmes de l’amitié entres deux jeunes que l’origine ethnique et la condition sociale devrait séparer et de la trahison et rédemptions, sont quand même très largement employé dans la littérature classique ou moderne. Mais on ne peut pas bouder son plaisir quand ces thèmes sont parfaitement utilisés et servent une histoire à la fois simple et complexe car non manichéenne, dans un contexte géopolitique fascinant et bien décrit.

Car ce qui est particulièrement intéressant dans ce livre, outre la langue qui est très belle, l’auteur maitrisant parfaitement la narration et le montage de l’histoire, nous tenant en haleine (pas grâce au suspens mais grâce à l’intérêt qu’on porte à l’histoire et aux personnages superbement décrits et d’une complexité subtile), c’est le côté documentaire, très réaliste, de l’Afghanistan d’hier et d’aujourd’hui. On est plongé au cœur de la vie Afghane d’avant les talibans, on comprend ainsi ce qu’on pu vivre ces populations face à l’arrivée des russes puis la prise de pouvoir des religieux et du règne de la terreur. Le narrateur nous offre une vision de l’intérieur, mais avec cependant le recul de celui qui est maintenant occidental. On découvre ainsi la mentalité de ce peuple, avec ses contradictions et son histoire, et les raisons, outre politique mais également culturelles, qui les ont aussi amenés à cette situation.


Un livre, entre le conte oriental et le récit autobiographique à lire absolument.

 
Le bulot l’a également dévoré.

6 commentaires:

  1. Et moi qui pensais que le jet lag était mental, et que tu ne digérais pas d'être rentrée... Et sinon, en trente jours d'airport, pas de George between 2 airs ? Quel dommage !

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  2. Ceci dit tu ne sais pas à quel point tu as raison quand tu dis que je ne "digère" pas d'être rentrée!
    Et non, pas de Georges dans les parages! Ce qui est bien dommage, je suis sûre que ça m'aurait aidé à passer le temps :)
    Un tit café Georgeounet??

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  3. j'aime bien comment tu parles de ce livre que j'ai lu ya un bout maintenant et qui m'a laissé un bon souvenir.
    Tu écris très bien. Bonne continuation

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  4. Waou... merci Laurent! C'est le truc le plus gentil qu'on m'ait dit depuis longtemps (hors ma maman of course!)
    J'ai toujours aimé écrire. Ce blog est aussi un moyen de laisser parler ce côté là de moi.

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  5. Tu devrais nous faire lire un de tes textes alors

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  6. Pourquoi pas, effectivement...

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