Comme vous le savez déjà, ce film avait suscité ma curiosité et il me démangeait sévèrement d’aller le voir. Surtout que la critique était plutôt bonne. Et puis vous êtes au courant, je suis un mouton abonné à ELLE, donc impossible que je passe à côté du battage médiatique fait autours de la sortie du premier film de Tom Ford futur-ex petit géni de la mode. En plus Julianne Moore joue dedans et Julianne Moore, elle a beau faire sa belle avec son histoire de fille à fille, moi je l’aime bien.
L’histoire :
Los Angeles, 1962. George Falconer, professeur d'université Britannique, perd son compagnon, avec qui il vivait depuis 16 ans, dans un accident de voiture. Malgré le soutien de son amie la belle Charley, elle-même confrontée à ses propres démons, George accablé de chagrin et de solitude, a du mal à se raccrocher à la vie. Mais une série d'évènements et de rencontres vont éclairer l’existence de cet homme sous un nouveau jour.
Autant vous le dire tout de suite, ce film m’a laissé… perplexe. Il fait parti de ces films qu’on n’arrive ni vraiment à aimer, ni à détester, qui ne vous laisse pas indifférent sans cependant arriver à vous toucher. Un beau film ? Oui. Un bon film… ni oui ni non.
On a tellement parlé de ce film, dans la presse, sur les plateaux de télévision, qu’on arrive forcément dans la salle avec une idée un peu préconçue. On attend Tom Ford au tournant sur le côté esthétique évidemment. On espère une reconstitution léchée et stylisée des années 60, des costumes haute couture et des cadrages conceptuels. On s’imagine que l’inventeur du concept de porno-chic, va nous présenter à l’écran une homosexualité dédramatisée, très sensuelle et, on croise les doigts, sans trop de provocation.
Et sur ces deux points, effectivement, on n’est pas déçu.
On a en effet l’impression d’être dans une pub pour un parfum au nom qui évoquerait le luxe chic et la volupté sensuelle. De gros plans sur les bouches, les yeux de biches des actrices, le chignons crêpés improbables, les peaux, donne un côté très tactile. Sensuel.
Los Angeles devient un décor hitchcocko-hollywoodien (les références au maitre sont à peine masquées voire ostensiblement exhibées) dans lequel se promènent de jeunes éphèbes aux muscles saillants et à la peau lisse et imberbe, mais relativement gentillet. D’une sexualité un peu à fleur de peau, mais juste troublant à point. Et puis l’homosexualité (qui avait fait scandale à la sortie du livre car c’était la première fois qu’on parlait alors d’homosexualité comme d’une pratique sexuelle « normale » avec un couple stable, aux sentiments profonds) n’est vraiment pas le sujet du film. C’est sans importance, preuve que les mentalités ont bien évoluées.
Les références à Hitchcock, par contre, sont très intéressantes.
Car Tom Ford aurait pu reconstituer un Los Angeles des années 60 très moderne en choisissant une mise en scène enlevée, mais il n’en est rien. On a l’impression de se retrouver dans un vieux film très bien colorisé, avec une mise en scène et un montage un peu old-school, ou un plan est un plan, et doit durer jusqu’à ce que tout ce qu’il a à nous dire soit dit et achevé. Mais ce qui doit à mon avis faire le bonheur des cinéphiles avertis m’a moi, profondément ennuyé, car cela confère au film un caractère très esthétique mais également très lent. En pause. Ce qui est justement l’idée que veut donner Tom Ford sur son personnage lui-même, en pause… mais et les sentiments là dedans ? Les tourments, la tristesse, la frustration de George ?
Raté, j’oserai dire…. Et c’est bien dommage car malgré le sujet poignant, d’un homme en plein drame personnel, on en arrive à regarder tout ça d’un peu loin, tant il manque à ce film le souffle d’âme nécessaire pour nous attacher à George, personnage rigide (britannique dans toute sa splendeur) à qui on a enlevé le seul soupçon d’impulsivité, dont il était de lui-même incapable, lorsque son compagnon est parti.
Alors certes Colin Firth est extraordinaire. De long plans sur son visage immobile qui aurait pu être d’un ennui crasse, deviennent intéressant car ils sont chargés d’une émotion et d’une expressivité due au jeu de l’acteur seul. Julianne Moore est très convaincante dans son rôle éternel d’une femme au bord de la rupture. Elle nous rappelle les grandes « stars » américaines qui ont fait d’Hollywood la cité des étoiles et du cinéma.
J’ai aimé le traitement des couleurs qui évoquent tantôt l’ennui et le détachement, tantôt le rayonnement intérieur de la vie qui malgré toute la solitude de George perce quand même… J’ai aimé le côté léché et stylisé de l’image, j’ai aimé ce côté détaché que Tom Ford rend très bien… mais j’aurai aimé aussi m’intéresser à George et sentir sa souffrance, puis sa lente renaissance.
Et donc au final on sort en ayant l’impression d’avoir assisté au film auquel on s’attendait en rentrant dans la salle : beau mais un poil superficiel, malgré le sujet qui est loin de l’être.
Le pire est qu’on ne peut pas accuser le réalisateur de s’être distraitement laissé avoir. On a la profonde sensation que c’était parfaitement voulu et recherché.
Disons que Tom Ford et moi, n’avons pas les mêmes attentes en ce qui concerne le cinéma. Mais il faut de tout pour faire un monde.
A mon avis ceux qui aimeront et ceux qui n’aimeront pas, le feront pour les même raisons.
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